L’épisode 3 de REGARDS CROISÉS vous fait vivre les méandres du déconfinement …

 

 EPISODE 3 : LES ÉTAPES D’UN DÉCONFINEMENT RÉUSSI …

Le regard de Charlie, le collaborateur : « Je suis en télétravail depuis plus de huit semaines en raison de la crise sanitaire. Malgré le déconfinement qui a eu lieu le 11 mai, mon entreprise m’a demandé de poursuivre le télétravail, alors que d’autres salariés reprennent une activité normale. Je n’en peux plus : j’ai besoin de retourner au bureau, de voir mes collègues, de reprendre mon rythme habituel. Je vais contacter Dominique, ma manager, pour lui demander si je peux tout de même revenir ».  

Le regard de Dominique, la manager : « Charlie m’a informée qu’il souhaitait retourner au bureau. J’ai compris qu’il vivait de plus en plus mal le télétravail. La direction, en accord avec le Comité Social et Économique (CSE), a préféré maintenir ce mode d’organisation pour les postes compatibles, si la présence des salariés concernés sur le lieu de travail n’était pas nécessaire. Je peux comprendre les difficultés de Charlie, d’autant plus que nous sommes surchargés de travail ».

Le regard de Camille, la juriste : « L’employeur a une obligation de sécurité : cela signifie qu’il doit prendre toutes « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale » de ses salariés (article L.4121-1 du Code du travail).

Ces mesures comprennent : 1°) des actions de prévention des risques 2°) des actions d’information et de formation 3°) la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’épidémie du COVID-19 constitue un changement de circonstances nécessitant l’adaptation des mesures protectrices de la santé des salariés. 

Nous avons bien sûr réévalué les risques et mis à jour notre Document Unique d’Évaluation des Risques (DUER), recensant l’ensemble des risques professionnels auxquels les salariés sont susceptibles d’être exposés.

Quant aux mesures nécessaires à la protection de la santé des salariés, nous avons suivi les recommandations du ministère du Travail. Ce dernier indique que « dans le cadre du COVID-19, les mesures nécessaires sont celles préconisées par le Gouvernement ». Ces mesures sont notamment :

1°) Les mesures mentionnées dans le Protocole national de déconfinement : https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/protocole-national-de-deconfinement.pdf

Ce protocole invite les entreprises, par ordre de priorité, à :

  • Éviter les risques d’exposition des salariés au virus : à ce titre, le ministère du Travail indique que le télétravail « doit être la règle chaque fois qu’il peut être mis en œuvre».
  • Évaluer les risques qui ne peuvent être évités.
  • Privilégier les mesures de protection collective (respect des règles de distanciation physique et des « gestes barrières », aménagement du lieu de travail, élaboration de plans de circulation, roulement des équipes, séquencement des activités, mise en place d’horaires décalés etc…) par rapport aux mesures de protection individuelle (masques, gants etc…).

2°) Les mesures préconisées dans les fiches conseils métiers du ministère du Travail et les guides édités par les organisations professionnelles :  https://travail-emploi.gouv.fr/le-ministere-en-action/coronavirus-covid-19/proteger-les-travailleurs-les-emplois-les-savoir-faire-et-les-competences/proteger-les-travailleurs/article/fiches-conseils-metiers-et-guides-pour-les-salaries-et-les-employeurs

Trois fiches conseils métiers sont communes à tous les métiers :

Nous avons informé tous nos salariés des mesures de protection mises en place. Nous leur avons aussi rappelé qu’ils ont l’obligation de prendre soin de leur propre santé ainsi que de celle de leurs collègues(article L.4122-1 du Code du travail) et qu’ils doivent donc se conformer à ces mesures, dont nous contrôlons régulièrement le respect.

Pour le moment, le télétravail est maintenu pour Charlie comme pour tous les salariés dont le poste est compatible avec le travail à distance et dont la présence au sein des locaux n’est pas nécessaire. L’intérêt est de supprimer le risque d’exposition de ces salariés au virus dans toutes les circonstances liées au travail (transports, lieu de travail, etc…). Leur santé est ainsi préservée et le risque de voir la responsabilité de l’employeur engagée par ces salariés est maîtrisé.

Nous soumettrons régulièrement aux collaborateurs un questionnaire d’évaluation des conditions de travail et des mesures de protection mises en place.

Enfin, nous avons diagnostiqué les points forts et axes de progrès de notre entreprise en matière d’organisation, de prévention et de relations sociales grâce au dispositif « Objectif reprise », lancé par le ministère du Travail le 19 mai dernier à l’attention des TPE/PME (https://travail-emploi.gouv.fr/le-ministere-en-action/coronavirus-covid-19/deconfinement-et-conditions-de-reprise-de-l-activite/article/covid-19-objectif-reprise-outil-gratuit-pour-aider-les-tpe-et-les-pme)

 

 Le regard d’Andréa, le RH :

  » Étant donné la nature de notre activité, les consignes du gouvernement et l’impérative protection de la santé de nos salariés, nous avons opté pour une reprise prudente, progressive et dont chaque étape fait l’objet d’une communication via visio aux collaborateurs pour permettre la réponse aux questions :

1°) Nous avons tout d’abord actualisé les Plans de Continuité d’Activité et mis en place les mesures de protection et d’information mentionnées par Camille (notamment le télétravail), en associant, entre autres, le CSE et le service de santé au travail. Nous avons également mis en place une cellule de crise pluridisciplinaire réunissant les compétences nécessaires pour assurer, sur la durée, la vigilance requise concernant les mesures sanitaires.

2°) L’étape 2 passe par la planification de plusieurs scénarios à adapter en fonction de l’évolution du contexte.

Dans tous les cas, le télétravail restera systématique pour les salariés vulnérables.

Pour les autres collaborateurs, nous envisageons la mise en place d’un dispositif de type « roulement par équipe » avec mise en place de binômes et de référents dans chaque service, pour permettre un retour progressif tout en réduisant les déplacements et facilitant le respect de la distanciation sociale. L’ordre de retour des services et le choix de la constitution des équipes à l’intérieur d’un même service sont étudiés de façon participative avec les partenaires sociaux, les managers, les collaborateurs et la cellule de crise.

Cette réflexion sur l’organisation collective du travail s’accompagne d’une réflexion sur l’accompagnement individuel des collaborateurs. Effectivement, la demande de Charlie n’est pas isolée. Semaine après semaine, nous sentons un « essoufflement », une démotivation et parfois un isolement chez certains collaborateurs. La dernière enquête d’Opinion Way rapporte d’ailleurs que 50% des salariés se sentent isolés et 47 % s’estiment en détresse psychologique.

Nous sommes très attentifs à ces signaux et avons décidé d’agir à plusieurs niveaux, collectif et individuel, pour prévenir les risques psychosociaux :

Mesurer la « météo » des équipes grâce à un baromètre quantitatif et qualitatif ;

Faire monter en compétence les managers sur l’organisation et la coordination de leurs équipes et sur l’accompagnement individuel des collaborateurs (motivation, analyse de la charge de travail, priorisation, détection des risques psychosociaux, adaptation des modes de fonctionnement et de communication, maintien du lien et de la convivialité de l’équipe…) ;

Faire monter en compétence les collaborateurs sur la gestion de la distance en termes d’outils, de mode de communication, mais aussi d’équilibre de vie et de gestion des temps de connexion et de déconnexion. Nous proposons par exemple régulièrement des webinars sur un sujet différent et avons mis en place des forums d’échanges à distance conviviaux sur les bonnes pratiques du télétravail ;

Donner la possibilité à un collaborateur qui en éprouve le besoin de parler en toute confidentialité avec un(e) psychologue : nous avons donc mis en place une antenne psychologique avec un partenaire externe.

3°) L’étape 3 que nous menons en parallèle consiste à inventer ensemble de nouvelles manières de travailler en faisant un diagnostic partagé de cette expérience, pendant laquelle nos organisations et nos collaborateurs ont su rebondir et s’adapter remarquablement.

Chaque collaborateur volontaire peut participer à cette réflexion organisée autour de plusieurs grands sujets que nous avons, tous ensemble, commencé à définir, par exemple : les enseignements et pratiques pour manager autrement, les pratiques pour créer le lien et la convivialité malgré la distance, les conditions nécessaires au développement de l’entraide et de la solidarité, le partage des compétences clés pour assurer la continuité des services, etc…

Cette étape est un enjeu majeur car nous ne pouvons pas continuer à travailler comme avant avec la contrainte de la distance. La charge de travail est trop forte ou trop inégale, les dysfonctionnements, déjà présents avant le confinement, s’accentuent et les équipes s’épuisent. L’organisation de demain doit être compatible avec les besoins humains comme le besoin de sécurité, de liens sociaux et d’appartenance, de reconnaissance, de développement personnel mais aussi d’équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle.

Concernant Charlie, je vais donc tout d’abord discuter avec son manager pour comprendre l’exacte nature de sa demande. Si besoin, je le recevrai bien sûr dans un second temps. Si les éventuels aménagements des modalités de télétravail avec son manager et son équipe ne sont pas suffisants pour restaurer le lien social dont il manque, il faudra envisager de prévoir son retour en priorité lors de l’étape 2, un ou deux jours par semaine, dans le respect des conditions sanitaires. »

 

Le conseil Regards Croisés :

1°) Si ce n’est pas déjà fait, réévaluer les risques et mettre à jour le DUER, en y intégrant les risques psychosociaux.

2°) Poursuivre le télétravail quand c’est possible. À défaut, privilégier les mesures de protection préconisées par le ministère du Travail.

3°) Se doter des compétences nécessaires pour mener une vigilance sanitaire rigoureuse.

4°) Planifier d’ores-et-déjà plusieurs scénarios de retours progressifs en intégrant l’organisation collective mais aussi le nécessaire accompagnement individuel et la prévention des risques psychosociaux.

5°) Développer les compétences des managers et des collaborateurs sur la gestion de la distance.

6°) Faire de la réflexion sur l’organisation de demain un projet fédérateur.

7°) Informer et communiquer de façon cohérente, transparente et régulière : c’est l’un des meilleurs moyens de créer la confiance et de faire baisser le niveau d’anxiété des collaborateurs.

8°) Rassembler tous les documents susceptibles de démontrer que l’obligation de sécurité a été satisfaite (compte-rendu des réunions avec le CSE et le service de santé au travail, mailing d’information à l’attention des salariés, plaquettes de présentation des mesures de protection, factures des tiers intervenus pour aménager les locaux et leurs éventuelles préconisations, procès-verbal d’huissier constatant les nouveaux aménagements et affichages, etc…). 

Article rédigé par Emmanuelle Foulonneau (Cabinet Effibé) et Claire Fauré (Cabinet Claire Fauré Avocat)

Vous souhaitez échanger sur vos prochaines étapes de dé-confinement et leur communication aux équipes ? Vous souhaitez identifier des moyens efficaces pour accompagner vos managers et vos collaborateurs à vivre positivement et sereinement cette période de crise ? Vous voulez engager une réflexion de fond sur l’organisation d’après ? Vous souhaitez avoir un benchmark des bonnes pratiques ?

N’hésitez pas à nous contacter.

 

Redécouvrez les derniers épisodes de Regards Croisés :

sur la mise en place de modalités efficaces de télétravail, https://www.effibe.fr/le-teletravail/

– sur le développement des compétences comme levier de gestion de l’incertitude https://lnkd.in/g5zKB4B